Flash Back de Mona Deeter

Monday, 9th October 1990 - 4h00 a.m - Northern Territory; Pine Creek


Le bruit assourdissant de la pluie réveilla Mona. L'orage gronda. La petite fille se leva, le coeur bondissant à vive allure. Elle sortit de sa chambre, la peur au ventre. Il faisait noir. Les volets étaient tous fermés, hormis ceux de la cuisine et une petite fenêtre dans le couloir. L'ombre des branches de l'arbre, qui se trouvait devant la fenêtre de la cuisine, projetaient des ombres effrayantes. Elle vit la lumière éblouïssante d'un éclair éclairer une demi seconde le couloir. Elle crut apercevoir pendant ce court lapse de temps une grande personne. Elle se figea, comme prit en "flagrand déli". Immobile, la respiration sacadée, la peur au ventre, elle attendit pendant plus d'une minute. Finalement, elle parcouru en courant la distance qui la séparait de la chambre de Arthur. Ouvrant lentement la porte légèrement grincante, elle passa la tête dans l'entrebaîllement. Ses yeux s'habituant enfin au noir, elle vit la silouhette informe de son frère cadet allongé dans son lit. Elle ouvrit un peu plus la porte, afin d'entrer dans la chambre de son frère, et referma lentement derrière elle. Elle se retourna, et eut un mouvement de recul.

"Mona? Qu'est-ce qui se passe, ça ne va pas?"

Son frère s'était levé et se tenait devant son lit, la tête penchée sur le côté. Sa voix allarmée ne réconforta pas la petite fille, qui regréta d'être venu dans cette chambre.

Elle hocha la tête à la question de son frère.

"J'ai peur." souffla t-elle.

Arthur s'approcha de Mona, et la prit maladroitement dans ses bras. Il la déposa sur son lit, et l'invita à s'y allonger, sous les couvertures. Après un instant d'hésitation, la petite fille s'y plongea. Son frère lui demanda de se pousser un peu, pour lui laisser un peu de place, ce qu'elle fit, sans se poser de question. Elle se blottit tout contre lui, fermant les yeux d'aise.
Son frère posa un bras réconfortant autour du petit corps frêle de sa soeur, et se rendormit aussitôt.

Mona se réveilla en sursaut. Elle était sûre d'avoir entendu quelque chose. Mais quoi? La pluie avait cessée, et le silence comblait le vide. Arthur se réveilla, peut-être quelques secondes après sa soeur, ne sentant plus son corps contre le sien.
Il se mit assis, fronçant les sourcils. Il regarda le réveil qu'il avait apprit à lire grâce à son père; 5h00.

"Mona?"

Un bruit de porcelaine brisée coupa court à l'interrogation d'Arthur. Mona sursauta. De vagues paroles se firent entendre dans le couloir. La petite fille se serra contre son frère, en entendant les voix se hausser. Elle y reconnut sa mère et son père. Ils semblaient tout faire pour ne pas se faire entendre, mais plus les secondes passaient, et plus la dispute s'envenimait, et bientôt, on entendit les parents de Mona et de Arthur hurler dans toute la maisonnée. Arthur curieux, descendit du lit, et s'approcha à pas de loup de la porte, Mona sur ses talons. Il tourna la poignée, et ouvrit la porte, laissant passer le flot de paroles entrer dans sa chambre.

"...espèce de gourde, tu ne vois pas que tu nous fais du mal?
-Qui fait du mal à qui? J'aime mes enfants, et je t'aim...
-Balivernes! Tu m'a trompé, tu nous as tous trompé! Non, mais regardes-toi! Tu bois à longueur de journée, tu ne fais plus rien à la maison, tu oublie même d'aller chercher les enfants à l'école. Bon sang! Mais où es-tu?!
-Je ne bois pas je...
-Arrêtes! Tu crois que c'est qui qui fais la vaiselle ici? Je vois tous les verre que tu t'enfile, et pas que du vin ou de la bière d'ailleurs. Wiscky, patis, martini, ça va, tout va bien pour toi? tu te crois où?
-Chez moi!
-Chez toi? oh! Alors exuse-moi ma chèrie, j'avais oublié que tu avais passé le balais aujourd'hui...
-Parfaitement, et c'est...
-Dans la piscine pauvre co**e! Tu as mis le balais dans la piscine! Pas memê tu te souviens de tes conneries. Dégage de mon plancher, tu n'as plus rien à foutre dans cette maison!
-Mais je...
-Il n'y a pas de mais. Cela fait deux ans que ça dure, et il est hors de question de passer ne serait-ce qu'un jour de plus comme ça! Le jour où tu boiera un coup de trop, que se passera t-il si les enfants sont là? Regardes le bleu qui se trouve sur les bras de Mona. Comment as-tu osé déjà la frapper?
-Je...je ne l'ai pas fait...exprès, c-c-c-c'est e-e-elle q-qui m'a cherché...
-Je t'interdis de toucher ma fille...
-Ta fille?
-Oui! A ce que je sache, c'est moi qui l'élève, c'est moi qui joue avec elle, comme avec tes fils d'ailleurs. Mais touche ne serait-ce qu'un cheveux de l'un de mes enfants, et je te tue!

Arthur et Mona frémir. Le frère de Mona ne savait rien de tout ça. Il savait que maman était bizarre, mais de là à frapper sa soeur?! Il sortit dans le couloir, tirant Mona avec lui. Les parents étaient tous deux dans le salon. Arthur demanda à Mona en murmurrant de lui montrer ses deux bras. Il retroussa les manches de la chemise de nuits de sa soeur, et fit de gros yeux.
Sur l'avant-bras droit la marque évidente d'un coup apparaissait.

Mona sourit gravement à son frère, sans pour autant comprendre tout ce qu'elle entendait.

"N'avance pas!
-Suzan?
-N'avance pas j'te dis!
-Allon, qu'est-ce que tu va faire mh?
-Qui sait?"

Arthur s'arrêta dans sa "contemplation", et, se collant au mur, tourna la tête vers le salon, où la lumière d'une lampe à abat-jour faisait luir un étrange objet noir que tenait sa mère d'une main tremblante, mais experte.
Il avait déjà vu ça dans les films de cow-boy. Les cow-boys s'en servaient pour tuer les indiens d'amérique. Il jeta un bref regard à Mona, pour s'assurer qu'elle ne se montrait pas, avant de revenir à la scène surprenante entre son père et sa mère.


"Si t'avance, je tire!
-Allons, Suzan, tu risquerai de le regretter...
-La ferme bordel!"

Le coeur de Mona battait à tout rompre. Qu'allait faire sa mère?

"Tu as bu hein?
-La ferme!
-Combien de verre mh? Combien?
-La ferme, la ferme! Me**e! Tais-toi!"

Le père de Mona s'approcha de deux pas, et on entendit des bruits de "bagarre" plusieurs choses se sont brisées, d'autres renversées.
Un coup de feu retentit.
Arthur se laissa tomber à genoux, le regard flou. Mona, ne comprenant pas, s'avança dans l'encadrement de la pièce.
Le corps apparement inerte de sa mère baignait dans une flaque de liquide sombre à l'odeur âcre.

Déglutissant avec difficulté, elle fut prise d'un haut le coeur.

"Mona!"

C'était Arthur. Tandis que Michel accourait dans le salon, alerté par le coup de feu, le père des trois enfants lâcha l'objet noir luisant, et prit le téléphone en composant le numéro des pompiers.
Mona regarda Arthur, puis, soudain, tout tourna autour d'elle. Elle sentit le sol se dérober sous elle, et tout fut noir.

Monday, 9th October 1990 - 6h30 a.m - Northern Territory; Pine Creek Hospital

"Regardez, elle ouvre les yeux!"

Effectivement.
Mona croyait être dans un rêve. Elle voyait vaguement plusieurs personnes, méconnaissables, penchées sur elle la mine apparemment inquiète. Où était-elle?
La petite fille entendait un son continue. Etait-ce une sirène? Bruit de klaxon, des coups de freins...Jurons, accélérations...

"Allez petite, ouvre grand les yeux, on amène ta maman à l'hôpital, tout va bien...Tu m'entends?"

Elle hocha la tête en fronçant les sourcils. Puis tout revint. La violente dispute entre son père et sa mère, le coup de feu, le liquide rouge, l'odeur âcre, et sa mère inerte sur le sol...
Elle ferma les yeux. Elle entendit la voix de son père, apparemment en pleur.
Elle se tourna vers lui. Il cachait son visage d'une de ses grandes mains, de l'autre, il tenait la main de Michel assit à côté de lui le regard dans le vide.

"Mona?"

C'était Arthur. Elle leva les yeux, et vit son frère. Il se pencha sur elle afin de lui dire au creux de l'oreille...

"Pardon."

La petite fille le regarda sans comprendre. Il semblait être réellement désolé, mais elle ne savait pas pourquoi. Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais aucun son ne sortit de sa bouche.
Elle déglutit bruyamment, décochant un sourire léger, mais bien là de son frère cadet, avant de refermer les yeux.


**Tut...tut...tut...tut...tut...tut...tut...**

Elle fut réveillée par le bruit incessant de l'électrocardiogramme. Blottit dans les bras de son père, elle releva légèrement la tête. Son père et elle étaient sur une chaise, dans le coin d'une chambre bien étrange. Il n'y avait pas de photo comme dans sa propre chambre. Il n'y avait même pas de tableaux pour décorer les murs.
Elle sentit les bras de son père se resserrer tandis qu'elle ramenait ses genoux contre elle.

Son regard s'attarda sur le lit. Sa mère reposait paisiblement. Sa respiration régulière rassura quelque peu Mona. La dite Suzan, tourna sa tête vers Mona, et croisa quelques secondes son regard.
Mona frissonna. Sa mère ferma les yeux, et parut s'endormir.

La petite fille balaya la pièce du regard. Elle vit tout près de la porte ses deux frères. Michel semblait dormir profondément, tandis qu'Arthur luttait pour garder les yeux ouverts. Mona se redressa doucement, et avec l'accord muet de son père, elle posa les pieds au sol, et s'avança vers Arthur, d'un pas mal assurés.
Ce dernier lui prit la main, et ils sortirent tous deux dans le couloir.

Il y avait peu de monde. Seuls quelques infirmières et un ou deux docteurs passèrent en leur jetant un regard furtif.

"Arthur?
-Oui?
-..."

Mona et son frère s'assirent sur deux chaises "côte côte", qui étaient fixées au sol. Arthur posa ses étranges yeux verts sur sa soeur. Mona était presque sûre à cette époque, que son frère était venu d'une autre planète pour avoir des yeux aussi bizarres. Ce qu'il ressemblait à leur père! Même si les yeux n'étaient aussi clairs chez leur père, il y avait quelque chose dans leur regard semblable à des boules de feu. C'était vraiment très étrange. Mais surtout chez son frère.
Il l'intimidait en quelque sorte.

Il ne dit rien, mais sembla lire dans les pensées de sa petite soeur.

"Maman va bien."

Dubitative, Mona haussa légèrement les épaules, ramenant une nouvelle fois ses jambes contre sa poitrine, chose qu'elle faisait souvent.

"Je te l'jure! Croix de bras, bras de fer, si je mens, je vais en enfer!"

Cette "citation" fit sourire la petite fille, qui se colla contre son frère, et finalement, s'endormit.

Friday, 13th September 1995 - 7h54 p.m - New South Wales; Silverton


Mona allait avoir deux soeur dans deux mois! Elle allait enfin être une "grande soeur". Quel effet cela faisait? Est-ce qu'elle allait les aimer plus que Arthur, ou que Michel, ou encore, plus que papa et Christine? Elle n'en savait rien. Et quand elle demandait à Michel, l'effet que ça faisait d'avoir un petit fère et une petite soeur, celui-ci repondait: "T'as d'autres questions stupides Mona?" La petite s'enfuyait en courant, sans pour autant être anéanti par la réponse de son frère ainé. Qu'importait, elle allait bientôt savoir, et pas la peine de Michel pour ça.

Elle sortait les poubelles avec une joie qui faisait même briller ses yeux ce soir là. Le dîner était à peine terminé, que déjà, les enfants s'affairaient à leur tâche du soir. Ils alternaient équitablement, pour qu'aucun ne soit désavantagés. Tout cela était controlé soigneusement par Christine et son père. Ah! Christine! C'était elle qui allait lui donnait deux soeurs, elle, et pas une autre. Plus que deux mois à attendre!

Elle ouvrit le petit portillon grinçant, et sortit la grosse poubelle. Elle la mit bien en vue sur le bord du trottoir, et se retourne pour repartir. Et, elle le vit. Un grs chien. En fait, il faisait énorme devant la petite fille. C'était un espèce de berger allemand. Un de ces gros chien dont parlait papa. Il disait de s'en méfier, qu'ils pouvaient être dangereux, même s'ils semblaient gentils, et doux.
Ce n'était pas tomber dans l'oreille d'une sourde.

La petite fille déglutit, et sourit, comme pour se rassurer. Il n'allait rien lui faire, puisqu'il ne lui avait rien fait...
Elle fit le tour du chien, lentement, très lentement, trop lentement. Sa lenteur agaça le chien, et la légère peur que Mona éprouvait sembla se lire dans ses yeux. Le chien bondit...

Mona courut en direction de la maison, mais quelque chose de puissant la retint fermement par l'avant-bras. Elle sentit une vive douleur.

"Arthur! Papa!"

Elle donna un coup de pied au chien, en vain. Elle sentit l'air lui manquait affreusement. Elle n'arrivait plus à respirer, c'était étrange...et effrayant. Elle hurla de peur, tandis que le chien grognait.

"Mona!"

Elle entendit le bruit distinct d'un coup de bate donner à un être vivant. La douleur s'estompa, bien qu'elle fut toujours là. Le fameux chien couina, et sembla partir à toute pattes...

"Mona? Ca va?"

Dans les vappes, elle hocha la tête, avant de fermer les yeux.

Saturday, 10th Febrary 1997 - 4h00 a.m - New South Wales; Silverton


"P'pa!?
-Mh?
-Elle est où Suzan?
-Ta mère?
-Mh..."

La voiture s'arrêta dans l'allèe, et le père de Mona lui fit face.

"Pourquoi tu me demande ça?
-Comme ça!"

Mona regarda quelque instants son père, avant de jeter un coup d'oeil dehors. Il faisait chaud et beau.

"Eh bien...Je ne sais trop en vérité Mona."

Cette dernière sortit de la voiture après une ou deux secondes de silence, regardant droit devant.
L'étrange comportement de la jeune fille inquiètant son père, alors qu'elle rentrait dans la maison.

"Arthur? On est rentré!"

L'intéressé sauta les quelques marches qui le séparait de sa soeur, et lui sourit.

"Alors, Ton cours de piano?"

La jeune fille soupira.

"Moué...
-Eh mais attends, ce n'était que ton premier cours! Si faut, tu vas devenir meilleure que maman!"

Mona fixa son frère avant de froncer les soucils.

"Elle est où m'man?"

Cette question prit au dépourvu Arthur qui fit une légère grimace, avant de très vite se reprendre.

"On s'en fou Mona je..
-Tu ne l'aime pas?"

Le grand frère baissa les yeux au sol l'air gêné.

"Non, ce n'est pas que je ne l'aime pas mais...
-Mais?
-...c'est comme ça"